Vote à tout prix

Publié le par M.T

Vote à tout prix

Nous avons tous au fond de nos mémoires l’exposition de faits divers dans toute l’horreur de de crimes insensés, de corps mutilés, de cadavres démembrés retrouvés enfouis au fond de jardins policés et bien entretenus. Ces descriptions insoutenables nous donnent la nausée et nous effraient tant qu’on se garderait bien de ne jamais nous retrouver nous-mêmes en de telles circonstances. Et pourtant, nous y sommes. En plein dedans. Notre corps agressé, poignardé, outragé… Je veux parler ici de notre corps électoral.

Que voyons-nous, qu’entendons-nous depuis des mois ?

Un ex-Premier Ministre, François Fillon affirme devant des millions de spectateurs que, dans le cas où il serait mis en examen, il retirerait sa candidature à l’élection présidentielle. C’est une question de moralité. Fillon est mis en examen, Fillon se présente aux présidentielles.

Un autre ex-Premier Ministre, Manuel Valls, affirme lui et devant autant de spectateurs que, dans le cas où il perdrait la primaire de la gauche, il soutiendrait le candidat désigné. C’est une question de loyauté. Hamon élu, Manuel (Valls) soutient Emmanuel (Macron).

Une député européenne, Marine Le Pen, celle là même qui, cherchez l’erreur, combat avec le plus de pugnacité l’Europe, promet un retour à l’ordre et aux valeurs famille, patrie. C’est une question de dignité. Convoquée devant un juge, Marine Le Pen ignore sa convocation.

De Gaulle, vous savez, celui qu’on nous met à toutes les sauces depuis cinquante ans, doit s’étrangler dans sa tombe, à faire vibrer les multiples cloches de Colombey et ses deux églises. Quant à nous, le corpus electorate, nous nous désagrégeons devant tant d’indignités, de traitrises, de parjures, de déloyauté, d’amoralité… Dois-je continuer ?

Voilà ce que nous apportent ces élections présidentielles de 2017. Elles mettent au jour l’inanité de nos politiques, leur médiocrité, leur rivalité de petits chefs, et leur grande capacité à retourner leur veste autant qu’à les rendre. Pire, ces élections 2017 nous démontrent la propension partagée de ces politiques à se penser au-dessus des lois qu’ils sont censés incarner.

Et face à tout ce fatras, on va nous demander de croire… Parce que voter, c’est croire. Croire en des lendemains meilleurs, croire que notre implication en ce jour d’expression citoyenne nous grandira et renforcera notre démocratie. Et surtout, croire que notre vote détient encore un quelconque pouvoir.

Sauf que ça ne marche plus. Dans le calcul à court terme et à courte vue de nos politiciens, dans cette volatilité de leurs engagements et le peu de cas qu’ils font de la parole donnée, dans cette constatation amère que les idéaux d’hier ne sont plus que des éléments de langage à traduction multiples et opportunistes, le corps électoral se meure, se noie, se désagrège.

Pire, l’indignité du politique, ses mensonges, ses tricheries, ses malversations, ses reniements provoquent aujourd’hui une telle implosion de ce corps électoral qu’elle le projette dans le néant ou vers des extrémismes catastrophiques. Ceux là même qui crient aux loups, puis, pris la patte dans le pot de confiture, au complot, créent, rassemblent et fortifient la meute qu’ils combattent. A dénoncer les turpitudes d’une extrême-droite sans foi ni loi, Les Républicains, sans aucune exemplarité dans leur propre camp, montrent qu’ils ne valent pas mieux. A organiser des primaires dont les résultats ne sont pas pris en compte, le Parti Socialiste se moque de ses propres électeurs et de la démocratie. A nous dépeindre de pures enquêtes de justice comme autant de manipulations destinées à lui nuire, et à s’y soustraire, le FN se met lui-même hors-la-loi.

Et nous ? Et bien nous nous devons nous arranger de tout cela et aller voter, continuant de croire que la République est à ce prix. Nous devons élire son Président entre des mis en examen, des traitres, anciens ou nouveaux, des menteurs, sans compter les petits derniers tout juste sortis de l’œuf qui pensent que la Guyane est une île et Cayenne, la ville où on fabrique les Porsche ?

Et bien moi je dis, ce vote aura un prix, un prix cher payé, le prix de l’amertume et du dégoût.

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