Pourquoi écrit-on un blog ?
Pourquoi écrit-on un blog ?
Grande question me direz-vous… à laquelle je n’ai pas franchement envie de répondre de suite tant le soleil qui brille dans mon jardin et traverse vigoureusement la fenêtre de mon bureau m’attire inexorablement vers une marche salutaire et bien heureuse en compagnie de mon labrador, qui lui, ne demande que ça.
Mais en même temps, il faudrait que je travaille. Et pas forcément à écrire sur l’un de mes blogs… enfin, je n’en ai juste que deux, tout de même, n’exagérons pas. L’un est littéraire et dans une tonalité particulière, le rose, pour l’incarnation que je souhaite la plus délicate possible du désir et des plaisirs. Et celui-là même qui s’étire paresseusement sous vos petits yeux et qui se veut plus ancré dans le quotidien, les actualités et ouvert sur leurs commentaires et analyses. Mais bon, comme dit précédemment, pour ceux qui suivent, il faudrait que je travaille aussi sur des sujets plus rémunérateurs. (Aïe, le soleil se cache… non… bon, tout va bien).
Je suis auteur et non, je n’ai rien publié à ce jour, mis à part quelques articles dans Libération, du temps où justement, internet et les blogueurs n’en étaient qu’à leurs balbutiements. J’ai également participé à l’écriture de plusieurs scenarii mais là encore, sans véritable volonté ou suite dans les idées d’imposer à qui que ce soit qu’on y cite mon nom me donnant droit alors à de substantielles rémunérations. J’aime travailler pour la gloire, sans doute… ce n’est pas le côté de ma personnalité dont je raffole le plus.
Sur quoi j’écris ? L’amour, ça c’est mon sujet fétiche, plus précisément le désir dans l’amour, ce qui donne envie de, ce qui pousse vers, ce qui crée l’attirance. J’aime les débuts. J’aime surtout les débuts. Ce qui pourrait peut-être expliquer mon manque d’allant et de persévérance lorsqu’il s’agit de développer. J’aime regarder arriver les trains, les avions, les bateaux, et observer alors le déplacement simultané de ceux qui attendent et viennent s’agglutiner en petites cohortes frémissantes et gloussonnantes devant les portes libérant leur flot de voyageurs. J’aime voir ces cous qui se tordent pour mieux voir, à chaque ouverture des battants automatiques si leur tant Espéré(e) va enfin les franchir, poussant devant lui/elle les relents de son voyage entassés sur des caddies couinant. Et j’attends alors les embrassades, les bras qui s’ouvrent et se referment, comme des ailes qui se mettraient à battre en exprimant la joie, l’émotion envahissante et perplexe qu’ils faillent alors se toucher pour mieux s’appréhender et se convaincre de la présence de l’autre, et qui exprimerait enfin le soulagement tout simple de se retrouver, d’être à nouveau réuni. L’Après appartient au quotidien et m’intéresse moins.
C’est un peu comme dans mes relations avec les autres. J’aime la venue, l’approche mais certainement pas l’habitude. Ce qui ne m’empêche pas, je vous rassure, d’avoir des relations riches, longues et durables. Je reste juste sur un fil dans cette capacité, peut-être plus que faculté, à prendre mon envol si les choses tournaient mal. Ho, pas sur un simple souffle d’air ni même une grosse tempête. Il en faut plus pour se débarrasser de moi. Mais je suis toujours en éveil et prompte aux changements. Et pourtant, dieu sait qu’il m’en coûte car à l’instar des statues, je déteste sortir de mon socle.
Mais ce n’est pas ce dont je voulais vous parler. Non, la question était : pourquoi écrit-on un blog ?... alors que je pourrais tout simplement enfiler mes chaussures de marche et rejoindre le sentier des douaniers ou autres vals (et pas forcément le socialiste), en m’égayant de cette nature généreuse et si particulièrement odorante de par chez moi. (le soleil est toujours là mais des nuages se forment… zut…).
Pourquoi écrit-on un blog ? Pour être lue, sans aucun doute, ce vecteur étant un outil extraordinaire pour rencontrer ses lecteurs lorsque les éditeurs vous boudent ou, plus honnêtement dans mon cas précis, lorsque je fais tout moi-même pour les éviter, ce qui me donnent cette force incomparable de ne pas me confronter à l’échec ni l’humiliation d’un refus parce qu’il est plus simple, vous l’aurez alors compris, de faire partie de ceux qui inhibent, limite dépressifs, toute élaboration de projet, plutôt qu’être un Chevalier Bayard qui partirait à l’assaut sans son cheval blanc. Ce qui revient à dire que si on était sûr des choses, on en ferait des grandes mais que dans l’expectative, on esquive.
En même temps, si je peux faire part d’un peu d’estime de mon moi-même, cela m’arrive de me battre, de me lancer dans de vastes batailles et d’aborder le succès avec provocation. Je finis alors mon ouvrage, sûre de ses qualités, et le serrant bien fort contre ma poitrine oppressée, les pieds ligotés dans un ruban de caoutchouc, je saute du pont dans un cri primal. J’ai plusieurs fois rebondi. Mais je n’ai jamais su alors, comment m’en dépêtrer. Je ne sais pas dealer, manœuvrer, courtiser, manipuler… j’aurai vraiment besoin d’un agent ou mieux, d’un commercial émérite et sans vergogne ou, plus exactement, telle Colette, d’un Willy m’enfermant dans mon bureau jusqu’à temps que je puisse lui glisser sous la porte le nombre exact de feuillets qu’il m’aurait ordonné d’écrire et qu’il s’empresserait alors d’aller faire éditer… à son nom…
Mais cela ne me dit toujours pas pourquoi on écrit un blog ? Peut-être pour éviter tout cela, justement. Écrire un blog ne demande aucun talent précis si ce n’est celui d’entretenir son public et lui donner envie de revenir vous lire. C’est à peu près la seule finalité possible. (et toujours ce soleil qui me nargue dehors… Grrr…). Mais moi, j’attends toujours un peu plus. C’est comme dans ma vie, il m’en faut toujours plus et non pas par insatiabilité chronique, mais parce que ne pas attendre plus, pour moi, serait… la mort.. mourir.. ne plus être. Cela a l’air catastrophique dit comme ça, mais la part de vérité dans cet aveu et son poids dans ma vie sont bien réel. Peut-être que j’ai alors ouvert un blog juste pour en avoir un peu plus, justement. Ne pas continuer d’écrire seule dans mon bureau en me morfondant à l’idée de ce que je peux rater à ne pas aller me promener lorsqu’il fait si beau pour un mois de janvier. Alors je me dis que si j’écris encore un peu, que je fais une publication, alors des regards vont survoler ces mots, les lire, les entendre, les faire réagir, les émouvoir, bref, les toucher.
Ca serait ça alors le pourquoi d’un blog : toucher les autres, leur donner cette petite part de moi-même sans vouloir apporter quoi que ce soit, je n’ai pas cette prétention, tout au moins, peut-être une, si, justement, et qui serait l’émotion. Quelle qu’elle soit. Le rire, le simple sourire, une réactivité même fugitive, en un mot, la sensation de recevoir ce qui pourrait changer quelque chose en nous. Péché d’orgueil ? Peut être. Mais pourquoi écrirais-je alors si je n’avais pas profondément ancré en moi cette volonté de donner. Oui mais un blog ? Pourquoi écrit-on un blog ?
Et bien, je n’en ai fichtre pas la moindre idée.